Ronflegueule était vieux.
Depuis des semaines, une toux étrange lui échappait. Parfois, sans prévenir, il crachait un jet de flammes qui incendiait un arbre ou plus encore.
Il comprit vite que quelque chose n’allait pas.
Il convoqua les chefs des villages au pied de sa montagne sacrée. Le vieux dragon avait toujours veillé sur eux. Il les avait protégés des pillards et même de deux royaumes voisins qui rêvaient d’annexer la vallée.
Quand tout le monde fut rassemblé, Ronflegueule prit la parole.
« Mes amis… L’âge m’a rattrapé. Je souffre d’un mal incurable pour un dragon. Une toux infernale. Je ne peux plus retenir mes flammes plus de quelques minutes. Je dois donc me retirer. Je partirai pour une montagne lointaine et j’y attendrai la fin, blotti dans une tanière où je ne risquerai de blesser personne. »
Le représentant des villages baissa la tête.
« Cette nouvelle nous attriste. Avec vous, nous perdons notre protecteur. Mais nul n’échappe au temps. Nous vous remercions pour tout ce que vous avez fait. Nous vous souhaitons un voyage paisible et un repos éternel. »
À peine eut-il fini qu’un spasme secoua Ronflegueule. La toux monta dans sa gorge comme une éruption.
Il essaya de prévenir. Il n’y arriva pas.
Une gerbe de feu gigantesque jaillit. L’assemblée fut balayée en un souffle. Les cris d'agonie portèrent sur plus d'un kilomètre.
Quand tout retomba, il ne restait que des cendres.
Le vieux dragon demeura immobile un long moment. Pas un rugissement. Pas un mot.
Puis il tourna le dos au massacre et s’envola lentement, lourdement, vers une montagne où il n’aurait plus à répondre aux vivants.
Il n’eut pas la force de pleurer. Il toussa seulement.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire